lundi 8 mars 2010

Et Dieu créa la femme...

Pour cette Journée de la Femme, j’avais envie de vous livrer un texte humoristico-grinçant que m’aurait  inspiré la lecture de nombre d’interviews, d’extraits et d’articles tournant autour du dernier ouvrage d’EB(1). Seulement voilà : je n’y arrive pas.

Non, résolument, je ne parviens pas à ironiser sur ce sujet qui me tient pourtant à cœur ; d’abord parce que je n’ai pas lu le-dit ouvrage, ensuite parce que mes capacités à disserter sont limitées (mon année de terminale remonte à loin, et j’ai eu 5 en philo au bac, alors je vous laisse imaginer !). Et puis, le débat est vain – je rentre pile-poil dans la catégorie des femmes qui se font épingler : j’allaite, je lave les couches de mon bébé, j’ai arrêté de travailler pour m’occuper de mes enfants (arrêt provisoire, certes, mais arrêt tout de même), je mange bio, me lave bio, me maquille bio, je me soucie du devenir de la planète et de mes enfants, bref, je suis  en plein dans la mouvance « naturaliste ». Je n’ai pas le souvenir d’avoir été culpabilisée par qui que ce soit, et je me sens au contraire bien plus libre et plus légère depuis que je ne réponds plus aux diktats des publicitaires et des industriels. Je ne suis ni une femme, ni une mère parfaite, mais je suis une femme/mère heureuse !

Vous n’aurez donc pas d’article à la petite sauce cynique. Juste trois points sur lesquels je voulais revenir avant de fermer cette parenthèse :
1- un point sur les couches lavables : qu’est-ce qui, selon vous, est le plus avilissant pour une femme : faire ses courses en grande surface, le bébé dans le cosy à cheval sur le caddie, puis sortir ses poubelles puantes (oui parce que, une semaine de couches empoubellées, ça ne sent pas la rose !), ou appuyer sur le bouton de sa machine à laver (puis de son sèche-linge) ?

Personnellement, je suis ravie, quand je vais faire mes courses (avec Elliott dans l’écharpe !), de ne pas avoir à passer par le rayon couches, ni le rayon lingettes, ni le rayon produits divers et variés et globalement inutiles et/ou mauvais pour sa peau.

2- un point sur l’allaitement : où est la pression sociale, le fameux diktat, qui pousse les jeunes mères à allaiter ? Vous en voyez beaucoup, vous, des pubs pour l’allaitement ? Non, précisément parce que ça ne se vend/s’achète pas. La Leche League tient-elle un stand entre deux rayons de votre hypermarché préféré ? Fait-elle de la propagande au pied de votre immeuble ?

Je vous demande ça, parce que chez moi, quand on vous livre le bébé à la maternité, on vous le fournit avec une boîte (rose) dans laquelle on vous fait cadeau de sa première tétine et du bon de réduction pour acheter le biberon qui va avec, et de sa première bouteille d’eau pour mélanger le lait en poudre dont le laboratoire t’offre le "suivi de sa première année" pour t’amadouer et le bon de réduc aussi pour amadouer ton portefeuille. Le tout agrémenté de photos de jeunes femmes au teint superbe, aux cheveux magnifiques parce qu'elles le valent bien et au décolleté plongeant - remettons les seins de la femme à leur place : nourrir un enfant est désuet, il faut éveiller le désir !
Je ne vous parle même pas de la couche sous cellophane, que bientôt faudra expliquer aux enfants, après leur avoir dit qu’un poisson c’est pas jaune et rectangulaire ou qu’une frite a d’abord été une pomme de terre, ou que le lait était dans la vache avant d’être dans la bouteille, que le bébé il est pas né (comme le poisson !) avec une pampouet sur les fesses…

3- A propos de pub Mme Badinter : saviez-vous qu’elle est l’actionnaire majoritaire de Publicis ? Sans vouloir dire que ceci explique cela, cette affaire n’est pas sans me rappeler les études de Procter et Gamble(2) qui visaient à montrer que la propreté ne s’acquiert pas avant 2 ans ½ voire 3 ans... Du coup, ça m’a coupé l’envie de lire son bouquin…

Parenthèse fermée, on peut tourner la page.


(1) Elisabeth Badinter, Le conflit - la femme et la mère
(2) Multinationale abritant, entre autres, la marque Pampers

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Edit du 11 mars 2010 :

Publicis : 4ème groupe mondial de communication, 2ème groupe mondial en conseil et achat média, et leader mondial en communication digitale et dans la santé. Ses principaux clients dans le domaine des produits de grande consommation (un des secteurs d'activités concerné parmi bien d'autres...) : Cadbury, Carlsberg, Carrefour, The Coca-Cola Company, Diageo/Guinness, General Mills, Hallmark, Heineken, Heinz, The Home Depot, JCPenney, Johnson & Johnson, Kellog, Kraft, L'Oréal (parce que nous le valons bien), Levi's, Mars, McDonald's Corp., Nestlé (font pas des p'tits pots, eux ?), Nike, Nintendo, Pernod Ricard, Philip Morris, Procter & Gamble (hasard, quand tu nous tiens !...), parmi d'autres.

Leur credo, que je vous laisse méditer :
"En délivrant des messages sensibles, justes, optimistes, la communication peut contribuer à un monde meilleur."

source : http://www.publicisgroupe.com/site/

8 commentaires:

BZH Matth a dit…

J'ignorais qui était Publicis exactement avant que tu m'en parles.

Sans avoir lu son bouquin (oui, je sais, c'est mal de critiquer dans ce cas... pour le moment, je me suis contenté des critiques (pour et contre)), je trouve lamentable de se dire philosophe dans de tels cas et user de son image pour imposer sa vision du monde.
Quoi? Tout le monde le fait? Ouais, bon ok, mais pas de la même façon alors.

Bonne journée de la Femme à toi... journée qui s'achève.

Charlyse a dit…

Bonjour!
Il faudrait quand même mettre un bémol suite à l'article. Déjà, la vague "naturaliste" se développe considérablement un peu moins en France, un peu plus dans les pays nordiques (notamment en Allemagne). Puis aujourdhui, ça fait plus "in" de porter son bébé en écharpe, d'user des couches lavables, de créer soi-même vêtements, lingettes et autre pour bébé, cuisiner bio et surtout s'ancrer dans la vague écolo.
En tant que jeune maman, j'ai moi-même porté mon fils en écharpe (pas pour m'insérer dans une quelquonque vague; mais c'est ce qui se fait naturellement en Afrique). J'ai allaité mon fils (aucune pression, c'était également un choix personnel naturel). Mon fils ne mange que du fait maison, avec des produits frais, "normalement" sans pesticide... certains avec l'étiquette "bio", d'autres pas... En revanche, nous avons fait le choix délibéré de ne pas se lancer dans les couches lavables après avoir hésité longuement (et je ne souffre pas des odeurs des couches qui ne s'entassent pas dans la maison). J'utilise du liniment pour nettoyer les fesses de bébé (plus du fait maison mais c'est tout aussi bien). Je n'ai pas travaillé pendant la 1ère année de mon fils par choix personnel... [et en 2009, le taux de femmes en France qui se sont arrêtées pour élever leurs enfants a augmenté.]
Bref, je ne réponds à aucun diktat... ni aux diktats des publicitaires et des industriels, ni aux diktats des écolos ni aux diktats des livres (il ne faut pas les oublier... les livres qui prêchent la "bonne" parole... combien de mères entend t-on dire "ah j'ai lu que" "ah dans tel livre, il est dit que...") ni aux diktats des parents et/ou beaux-parents qui ont LA bonne méthode pour...
Je pense qu'en tant que primipare ou multipare, le plus important est d'écouter son coeur et surtout son bébé.
Peut-être moins en France... mais il est vrai qu'en Allemagne, l'allaitement est répandu et on incite les femmes, en maternité à allaiter. Rien est obligé ni fortement incité... les femmes sont juste encouragées et/ou soutenues dans leurs démarches. Dans les lieux publics, en Allemagne (ou tout du moins Hambourg), des espaces allaitement existent pour les mamans qui sont en promenade avec leur(s) bébé(s). Après, il n'y a pas (encore) de pub télé en faveur de l'allaitement mais beaucoup d'éléments d'incitation en pharmacie.
C'est vrai qu'avec mon bébé aucune boîte ne m'a été livrée... la sage-femme de la maternité, la puéricultrice puis la sage-femme à domicile m'ont juste dit "faites comme vous le sentez, c'est à vous d'apprendre à connaître votre enfant et vous verrez tout se passera très bien".
Maintenant, mouvance écolo, méthode traditionnelle ou adeptes des diktats... l'essentiel est que chacun trouve son compte, sans se sentir jugé ou montré du doigt. Comme tu le dis, personne n'est parfait.. aucune méthode n'est parfaite: il n'ya pas UNE méthode mais DES méthodes, chacune avec son lot de positif et de négatif.

DdM a dit…

BZH Matth > J'ai ajouté un "édit" spécialement pour toi ;) J'ai pensé que si toi, tu ne connaissais pas vraiment Publicis, d'autres seraient sans doute dans ton cas ! (je ne me fie jamais à mes non-connaissances, mon état d'inculture étant assez vaste !)

DdM a dit…

Charlyse > Tout d'abord, merci pour ton commentaire/témoignage, même si je m'y sens personnellement attaquée. Mon article visait juste à montrer que, contrairement à ce que clame EB, une mère peut se sentir pleinement femme, et parfaitement s'épanouir, même en ayant opté pour l'allaitement et les couches lavables. Et qu'une soi-disant philosophe actionnaire d'un grand groupe publicitaire, personnellement, ça me dérange, surtout quant à l'objectivité de ses propos. Cela étant, je n'ai jamais cherché à condamner, ou ne serait-ce que critiquer, les modes de vie des autres femmes/mères. Comme le dit fort bien le proverbe, "chacun voit midi à sa porte" et en l'occurrence, mon blog est la vitrine de ce que je vois moi, et n'a pas la prétention d'être représentatif de qui que ce soit d'autre. Comme tu le dis très justement, il n'y a pas UNE méthode, il y a DES méthodes, et comme tu l'auras remarqué, il n'y a pas UN type des femmes, il y a DES types de femmes, chacune avec ses origines, son vécu, son histoire et ses choix. Et parfois, les uns entrainant les autres, ces choix évoluent et nous sourions de nous voir avoir parcouru ce chemin - ce qui est mon cas. Il m'aura fallu trois enfants pour m'autoriser enfin à "m'écouter et écouter mon bébé", à m'affranchir du discours dirigiste de certains médecins. Il m'aura fallu trois enfants pour réussir enfin à en allaiter un et constater à quel point j'ai pu être mal conseillée, peu épaulée et pas préparée pour mes filles que j'aurais pourtant tant voulu allaiter. Il m'aura fallu trois enfants pour prendre du recul sur pas mal de choses, et faire de vrais choix - comme celui des couches lavables par exemple. Il m'aura fallu trois enfants pour avoir enfin la chance de prendre un congé parental et de ne pas avoir à reprendre le boulot, non pas par choix mais par obligation, après 12 semaines. Oui, il m'a fallu du temps, là où tu sembles avoir trouvé ta voie "du premier coup".
(suite dans commentaire suivant)

DdM a dit…

(suite)
Dans ce contexte, je crois pouvoir dire que je ne réponds à aucun diktat ni à aucune mode. Les livres que je lis, je les choisis en fonction de mes convictions propres, ils font écho en moi, mais ce ne sont pas eux qui me disent (me dictent ?) ce que je dois faire. Certains de mes choix sont dans la continuité des précédents (avant l'écharpe, j'avais des bras, tout aussi efficaces quoi que moins pratiques, et un porte-bébé qui s'est avéré ne pas être "physiologique" donc que j'ai abandonné ; j'ai "cododoté" Zoé quelques fois, mais face aux menaces - de mort ! - de certains médecins, j'ai vite abandonné, résignée et terrorisée), d'autres en opposition (je ne m'étais jamais posé de questions sur l'éventuelle nocivité des couches jetables par exemple, et on ne parlait ni de parabens ni de bisphenol A en 2003 ; j'ai fichu aux orties pour de bon ce satané conseil selon lequel il faut laisser pleurer les bébés, pour n'en faire qu'à ma tête cette fois). Bref, ces changements qui s'opèrent dépassent largement la sphère d'une quelconque mode naturaliste ou écologique - même si je reconnais que nous sommes très à l'aise dans ce courant. D'ailleurs, pourquoi refuser d'admettre que certaines personnes puissent avoir de réelles préoccupations écologiques (il s'agit certes d'un phénomène de société, mais qui peut affirmer qu'il n'est pas justifié ?) et changer un certain nombre de leurs comportements par réelle conviction et pas seulement "pour faire bien" ? Il en va de l'écologie comme de la religion : il y a les sceptiques, les athées, les théologiens, les croyants, les pratiquants, les profanateurs, les hérétiques, les intégristes, il y a ceux qui se targuent d'appartenir à une chapelle sans pour autant en appliquer les dogmes, ceux qui s'enferment dans des monastères pour prier, et ceux qui préfèrent mettre leur foi au service de leurs semblables, il y a ceux qui refusent de se marier devant Dieu et ceux qui le font pour justifier l'achat de la robe et les 300 convives... Libre à chacun de suivre la voie qui lui semble être la sienne, sans se sentir condamné par les autres...

Charlyse a dit…

Mon commentaire n'avait pas pour de t'attaquer personnellement... Tout d'abord, parce que je ne te connais pas personnellement (pour t'attaquer) ET surtout, je ne vois pas l'intérêt d'attaquer "en public" (s'il fallait attaquer).
Si je me suis permise de répondre (cette fois-ci) à ton post, c'est parce qu'il fait partie de la rubrique "ces sujets qui font débat" et, à mon sens, il s'inscrit parfaitement dans l'air du temps avec ces grands débats, "redynamisés" par la parution du livre d'EB. D'ailleurs, l'émission de France 5 "les maternelles" a traité ce sujet le 11 mars dernier.
Après, mon propos précédent n'allait pas chercher plus loin! Voilà pour mon intervention : ce n'était qu'une parenthèse.

Arlette (qui a la flemme de retaper son compte Google) a dit…

Pour EB, je crois qu'on a suffisamment insisté sur ses liens avec Publicis... Mais sans doute pas dans les médias "grand public", qui ont l'air de lui réserver un espace de parole assez confortable. (J'ignore cependant à quel point, puisque je vois ça de Belgique; ici, je sais qu'elle a refusé un face à face avec une tenante de l'allaitement : http://www.rtbf.be/info/societe/litterature/elisabeth-badinter-les-dessous-d%E2%80%99une-interview-198991 )
Personnellement, elle me semble représenter un féminisme "grand bourgeois", avec lequel je ne ressens pas vraiment d'affinités.
Pour moi, être féministe, c'est défendre le droit au choix, pour toutes les femmes. Bien sûr, il faut continuer à déconstruire les réflexes sexistes- patriarcaux qui subsistent dans nos comportements... Mais j'ai l'impression que les mamans "nature" actuelles sont justement des femmes qui ont su s'en détacher, qui ont fait des études, et qui impliquent le papa dans l'éducation de leur enfant...

(Ceci dit, les "pressions" en faveur de l'AM, ça existe, surtout dans le discours médical. Mais c'est un autre débat...)
(NB: j'ai allaité mon Pioupiou, je continue à le faire partiellement, et j'en suis très contente, pour que tout soit clair ;-)

Un papa a dit…

Merci pour cet article selon moi for juste.
Un petit point concernant la "boite rose" et tout ce qui va derrière. La société "Family service" qui la distribue a sur son site un digest de sa stratégie marketing ou on cerne bien l'esprit de leur mécanique : alpaguer les parents quand ils sont le plus fragile (je traduis à peine, tant c'est édifiant).
Allez-donc y jeter un oeil, c'est très instructif : http://www.familyservice.fr/